1956 - Mozart, Gérard Philipe, des destins parallèles ?

Mozart raconté aux enfants par Gérard Philipe

C’est en 1956, année bicentenaire de la naissance de Mozart que sort un disque Adès (collection Le Petit Ménestrel), Wolfgang Amadeus Mozart, sa vie, ses œuvres racontées par Gérard Philipe. Maintes fois réédité, ce disque est devenu un classique des disques pour enfants.

Gérard Philipe y narre un texte de Georges Duhamel (de l’Académie française) et de Antoine Duhamel. Si certaines approximations et raccourcis dans cette présentation de la vie et de l’œuvre du génie de Salzbourg peuvent désormais faire tiquer, ce texte de liaison disposé entre des extraits d’œuvres est dit avec une sincérité manifeste et beaucoup de conviction par Gérard Philipe. 

 Mozart raconté aux enfants par Gérard Philipe

Confrontée aux partitions de Mozart (choisies parmi les plus connues), la diction du comédien se fait moins chantante, douce, ferme, oscillant parfois entre insistance et envolées pour faire comprendre, le plus simplement possible, une vie aussi foisonnante résumée en aussi peu de phrases. Philipe semble bien en adéquation avec l’idée que le travail est nécessaire au don, que l’œuvre réalisée transcende la chair du créateur, ou que Mozart était, en quelque sorte, « l’interprète des dieux ». Il semble réellement touché par ce destin fugace, empli d’admiration pour l’œuvre, désireux de partager son enthousiasme.

 

Mozart raconté aux enfants par Gérard Philipe

Peut-on écouter ce récit sans penser que l’un des derniers disques écoutés par Gérard Philipe – sinon le dernier – fut un disque de Mozart ? Le compositeur semble lui avoir été cher.

 

Ce qui frappe désormais l’auditeur actuel, c’est un certain parallélisme entre les destins du narrateur et celui du musicien. Après une introduction, dans laquelle résonne la symphonie n° 40 (KV. 550), Gérard Philipe apostrophe ainsi les auditeurs :

 « Mes enfants, mes amis, mes camarades, vous aimez la musique puisque vous avez disposé ce disque sur votre appareil. Alors je vous demande tout simplement : connaissez-vous ce que vous venez d’entendre ? C’est la symphonie en sol mineur de Wolfgang Amadeus Mozart. Vous connaissez tous au moins le nom de cet étonnant musicien. L’un des plus grands musiciens du monde. Ce que vous ne savez peut-être pas, c’est que Mozart n’a vécu que 36 ans à peine, que durant cette vie si brève, il a eu une renommée de virtuose, qu’il a composé plus de 600 œuvres variées, qu’il a beaucoup voyagé, qu’il a été bon fils, qu’il a eu lui-même des enfants, et que le monde moderne, le monde entier lui rend chaque jour, un hommage d’admiration et de reconnaissance. »

 

Vie brève, célébrité ou gloire internationale, souvenir prégnant, vertus familiales, presque rien ne manque… (On se demande d’ailleurs, pourquoi cette insistance sur les vertus familiales ; parce que ce disque s’adresse aux enfants ? Enfants d’ailleurs destinataires d’un texte bien plus emphatique que ce qui est maintenant d’usage.)

 

 Mozart raconté aux enfants par Gérard Philipe

 

Le nom de Mozart reviendra d’ailleurs comme un leitmotiv dans les nécrologies de Gérard Philipe. Ainsi, L’Express du 3 décembre 1959 présente-t-il un portrait (d’une laideur sans nom et totalement apocryphe) de Mozart à côté d’une photographie du comédien pour illustrer sa nécrologie de Gérard Philipe. Pour Jean Cau, en effet,

 « Alexandre, Mozart, Saint-Just, Shelley, Lorenzacio, Guynemer..., ce n'est pas un hasard si j'évoque pêle-mêle vos noms dissonants - et votre jeunesse et votre mort - à propos de la fin, en cette année 1959, d'un illustre comédien. »

 

Nécrologie de Gérard Philipe par Jean Cau, L'Express du 3 décembre 1959

 Photographies © Gallica-BnF, Discogs et L’Express.

Ce jour, 5 décembre 2021, marquait le 230e anniversaire de la mort de Mozart.

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