1948 – Un quart d’heure avec Gérard Philipe (interview)

 Gérard Philipe (portrait de Sam Lévin) © Médiathèque du Patrimoine et de la Photographie

 En 1948, un journaliste du Figaro passe « Un quart d'heure avec Gérard Philipe ». L’acteur est en pleine promotion pour son dernier film, La Chartreuse de Parme, réalisé par Christian-Jaque. Réponses à la volée, donc, desquelles émergent des « éléments de communication » quelque peu stéréotypés…

« [...] Après avoir tourné L'Idiot, nous dit Gérard Philipe, j'avais une envie folle de remuer, de courir, de jouer dans un film de cape et d'épée. Malgré toutes tes satisfactions que m’a procurées l'interprétation du héros de Radiguet, Le Diable au corps, sur ce plan, ne pouvait que mal répondre à mon attente.

Pour en venir à La Chartreuse de Parme, où j'ai trouvé le dernier en date de mes rôles, l'œuvre laisse à ses lecteurs le souvenir de personnages plutôt que d'épisodes. Cependant, le roman de Stendhal offre maints éléments d'action et le cinéma, après tout, peut y cueillir de quoi nourrir son goût du mouvement. Ainsi, croyant que j'allais tourner une fois de plus un film psychologique, j'ai trouvé, peut-être paradoxalement, dans La Chartreuse, le fameux rôle de cape et d'épée : poursuites, sang, amour, prisons, évasions, rien n’y manque. Les stendhaliens s’en offusqueront-ils ?

Toutefois, les adaptateurs ont réduit au minimum une scène telle que la bataille de Waterloo, et Dieu merci, car s'il m'arrive d'avoir la bougeotte, je ne possède pas encore l'art d'un grand cavalier.

Et Le Rouge et le Noir ?

— Julien Sorel m’intéresse beaucoup. Mais je ne veux pas interpréter ce personnage immédiatement après Fabrice del Dongo. Comment pourrait-on montrer au public, à bref intervalle, et sous le même visage, deux caractères aussi différents d'un même auteur, caractères si diversement riches d'un auteur si richement divers ?

— Alors, vos projets ?

— Deux films : une histoire triste et une histoire gaie de mon ami Jacques Sigurd. En avril, je commencerai Une si jolie petite Plage (c’est l'histoire triste). Je retrouverai comme partenaire Madeleine Robinson avec qui j'ai débuté sur la scène. En août, probablement, je tournerai, avec Micheline Presle, M, Pégase, géomètre. M. Pégase est un très bon homme (c'est l'histoire gaie). » (Paul Carrière, Le Figaro, 25 janvier 1948.)

 

Les Stendhaliens ou Beylistes critiqueront vivement cette adaptation… Voir, par exemple, un compte rendu cité dans ce billet.

La bataille de Waterloo devait faire l’objet d’une « image fixe ». Apparemment tournée, elle ne fut pas incluse dans le film… La scène est pourtant présente dans l’adaptation romancée du film. (Voir ce billet.)

Gérard Philipe était un piètre cavalier… Ce qui est toujours notable dans Fanfan La Tulipe ! Anne-Marie Philipe racontera à plusieurs reprises que son père « montait comme un pied » et aurait même eu peur des chevaux.

Les deux scénarios de Jacques Sigurd seront mal reçus par la critique et ne seront pas des succès publics : Une si jolie petite plage et Tous les chemins mènent à Rome

 

Illustration : photographie de Sam Lévin (sans date) © Médiathèque du Patrimoine et de la Photographie.

 

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