2015 – "Rendez-vous avec le Cid", une fiction radiophonique de France Inter

 

 

En 2015, dans l’émission « Affaires sensibles », France Inter diffuse une dramatique radio qui évoque la vie de Gérard Philipe, centrée sur la rencontre entre Jean Vilar et Gérard Philipe et qui évoque l’aventure du Théâtre National Populaire, Rendez-vous avec le Cid. 

Cette fiction de Renaud Meyer est toujours disponible en streaming et peut être écoutée ICI.

Elle se divise en deux parties : la fiction proprement dite (environ 26 minutes), et une interview de Gérard Bonal, biographe de Gérard Philipe

 

La distribution, excellente, de la fiction est : Pierre-François Garel (Gérard Philipe), Pierre Baux (Jean Vilar), Marie Constant (Nicole Fourcade / Anne Philipe), Jean-François Perrier (Christian-Jaque). Avec les voix de Sylvia Conti, Françoise Cousin et Matyas Simon.

S’il est évidemment impossible aux deux comédiens principaux de se couler totalement dans les intonations si connues et si caractéristiques de Philipe et Vilar, leur incarnation en reprend parfois certaines, au-delà de l’imitation servile. Comme si les textes des deux protagonistes dictaient une respiration, un ton général. Ce n’est donc pas une trahison, mais un bel hommage.

 

Rendez-vous avec le Cid, une fiction radiophonique de Renaud Meyer fondée sur les archives

 

Cette fiction débute par un prologue biographique expliquant l’importance de Gérard Philipe dans son temps et rappelant son parcours :

 

« [En mourant], celui qui rassembla les attentes de toute une génération éprise d’héroïsme et de liberté, qui fut le symbole de la jeunesse et du romantisme, emporte avec lui Rodrigue, Ruy Blas, le prince de Hombourg, Octave et Perdican. Il fut chacun de ces personnages, au-delà de toute interprétation. Parce que ce corps parfait, digne d’un Donatello, cette voix rare, victorieuse, insolente et lyrique, affranchie de toute convention, ce charme entre légèreté et gravité, cette grâce posée sur son être comme un don des dieux, il ne les convoquait que pour être un homme parmi les hommes. S’engageant dans la vie comme au théâtre. Ce qui le plaça naturellement au cœur de la plus grande aventure théâtrale du XXe siècle : le Théâtre National Populaire. […] [Sa carrière jusqu’en 1948] ne l’inscrit pas dans une œuvre dramatique d’importance historique. Jean Vilar va incarner ce destin, et faire de Gérard Philipe une légende. Pourtant, le rendez-vous entre les deux hommes faillit ne pas se faire. » (texte de Renaud Meyer.)

 

Octobre ou novembre 1949 : Gérard Philipe et son ami le poète Henri Pichette présentent la pièce de théâtre Nucléa à Jean Vilar, dans l’espoir de la lui faire jouer. Vilar propose le rôle du Cid à Philipe.

Sources : Les dialogues s’inspirent du célèbre récit de cette rencontre qu’en a fait Vilar ; des déclarations ultérieures de Gérard Philipe sur la tragédie, la différence qu’il percevait entre tragédiens et comédiens, entre la prose de Camus et celle de Corneille ; sur un texte ultérieur de Gérard Philipe à Vilar (sur le recrutement d’un emploi à la Musset pour la tragédie cornélienne). La plupart de ces textes ont été publiés dans Souvenirs et témoignages recueillis par Anne Philipe et commentés par Claude Roy, Gallimard, 1960, pp. 124-128. Quelques propos de Gérard Philipe viennent d’une interview radiophonique de 1954 citée par Gérard Bonal.

 

1949-1950 : Gérard Philipe recherche des projets théâtraux en faisant des listes.

Source : Anne Philipe en a parlé en interview à L’Événement du Jeudi, en 1987. Elle est citée par Gérard Bonal dans sa biographie de référence.

 

Octobre 1950 : Gérard Philipe va trouver Jean Vilar dans sa loge du Théâtre de l’Atelier après Henri IV et lui propose de travailler avec lui. Il accepte de jouer les rôles-titres du Prince de Hombourg et du Cid.

Sources : ibid. que pour 1948, avec quelques aménagements. Sur le futur TNP, tiré des textes de Jean Vilar (Memento (à vérifier) et sa conférence de presse sur le festival d’Avignon.)

 

Sur le premier refus de Gérard Philipe, le commentaire se fonde sur les analyses de Claude Roy. (Souvenirs et témoignages…, p. 121-122.)

 

17 juillet 1951 : à Avignon, Gérard Philipe chute durant la dernière répétition nocturne du Cid, la veille de la première.

Sources : sur la chute en répétition, Souvenirs et témoignages… p. 140-142, ainsi que la biographie de Gérard Bonal avec des citations d’Anne Philipe tirées de son interview à L’Événement du Jeudi ; sur les yeux rouges de trac, témoignage de Françoise Spira, Souvenirs et témoignages, p. 136 ; début de la critique de Morvan Lebesque repris dans les dialogues de Vilar et Philipe, Souvenirs et témoignages, p. 142 ; le dialogue de Nicole Fourcade se fonde sur son témoignage publié dans Avignon en festivals ou Les utopies nécessaires de Paul Puaux Hachette, 1983.

 

Août 1951 : tournage de Fanfan la Tulipe.

Sources : le refus de Gérard Philipe de refaire une prise se fonde sur le témoignage de Christian-Jaque, Souvenirs et témoignages p. 283-284 ; sur leurs conceptions divergentes du rôle de Fanfan, Ibid. p. 284-285 ; sur le jeu « freeze and melt », témoignage de Geneviève Page, Ibid. p. 285.

 

1954 : Tournée à Varsovie du TNP et mouvement de foule des admirateurs de « Fanfan »

Sources : La demande des 5000 entrée pour les étudiants est racontée par Daniel Anselme, Souvenirs et témoignages… p. 289-290 ; la scène de l’émeute des admirateurs de « Fanfan Tulipan » est relatée par sa partenaire de scène Zanie Campan qui l’accompagnait (et non son épouse Anne comme dans la fiction), Ibid. p. 290-292.

 

1954 : Gérard Philipe décide de s’éloigner momentanément du TNP

Sources : les échanges de saluts entre Philipe et Vilar dans leur loge viennent du Mémento du 29 novembre 1952 au 1er septembre 1955 de Jean Vilar, Gallimard, 1981, p. 166 ; le passage sur la relecture du Cid avant une représentation est tiré d’une note de Jean Vilar datée du 5 octobre 1954, glissée sous la porte de la chambre d’hôtel de Gérard Philipe à Varsovie, Notes de service de Jean Vilar, Actes Sud, 2014, p. 102 ; on y trouve aussi des réminiscences d’une lettre de Vilar à Philipe du 11 août 1951 reproduite dans Jean Vilar / Gérard Philipe : J’imagine mal la victoire sans toi, Triartis, 2019, p. 10 ; les propos de Gérard Philipe reprennent certains passages d’une lettre de décembre 1954 adressée à Jean Vilar, Ibid. p. 39-40 ; « Tu n’es pas que Rodrigue ou Hombourg… », note de Jean Vilar à Gérard Philipe, fin décembre 1954, Ibid. p. 27.

 

La fin de la fiction revient brièvement sur la carrière ultérieure de Gérard Philipe. 


Gérard Philipe dans Le Cid © DR


Une interview passionnante de Gérard Bonal sur Gérard Philipe

Après un interlude musical et un extrait des Stances du Cid par Gérard Philipe, cette dramatique est suivie par une interview de Gérard Bonal. (Rappelons que ses recherches ont permis de publier une biographie en 1994 (rééditée dans une version augmentée en 2009).

Très intéressant, cet entretien aborde les thèmes suivants :

·        Les grandes qualités humaines de Gérard Philipe, et ses failles ; son caractère cyclothymique ; ses refus pour les propositions importantes de sa carrière,

·        La condamnation pour collaboration de son père Marcel Philip ; le dossier à décharge trouvé par Gérard Bonal,

·        L’engagement politique et syndical de Gérard Philipe, son combat pour les acteurs et comédiens,

·        L’emploi du temps harassant de Gérard Philipe,

·        L’aura de Gérard Philipe : essai de définition de ce charisme. « Gérard Philipe est tombé au bon moment » dans l’histoire du cinéma et du théâtre,

·        Les raisons de l’élégance de Gérard Philipe, et du « tombé » de ses costumes,

·        Les relations entre Jean Vilar et Gérard Philipe et leur évolution : leur rencontre, la création du Prince de Hombourg, la création du Théâtre National Populaire en 1951, le week-end de Suresnes (voir aussi ici et ), son désintéressement financier au sein du TNP,

·        La polyvalence d’acteur de Gérard Philipe : son travail de comédien avec Fanfan la Tulipe, la profondeur de jeu de Gérard Philipe, son « espèce de folie » dans ses grands rôles au cinéma,

·        Anne Philipe, son rôle dans la vie professionnelle de son mari,

·        Le statut de vedette de Gérard Philipe, sa place à l’international,

·        Les « héritiers » de Gérard Philipe,

·        Lecture de l’hommage de Jean Vilar à Gérard Philipe (novembre 1951).

 

Bonne écoute !


Illustrations : aquarelle d’après une « Une » de Cinema Nuovo. -Gérard Philipe dans Le Cid © DR.

 

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