Si certains, comme Maria Casarès, ont vu en Gérard Philipe un être « insaisissable », « profondément romanesque, épris de légendes » (Gérard Philipe, Souvenirs et témoignages recueillis par Anne Philipe et présentés par Claude Roy, Gallimard, 1960, p. 80), presque scindé entre un être solaire et un autre mélancolique, la fantaisie et l’aspect parfois fantasque de son talent ont marqué ceux qui l’ont connu. Le comédien « classique » ou avant-gardiste, le jeune premier de cinéma sont toujours présents dans les mémoires, mais les talents d’improvisation de Gérard Philipe sont moins connus. Passons-les donc en revue à l’aide d’un florilège de témoignages…
Toute une galerie de personnages…
Fantaisie, talent d’improvisation,
imagination (déjà relevée et appréciée par son maître au Conservatoire Georges
Le Roy qui voyait en lui un futur grand acteur de composition), tous talents
très appréciables pour un comédien, voici de quoi se glisser dans différentes
peaux et de projeter ces personnages sur le public…
C’est ainsi que, dans le répertoire de prédilection de Gérard Philipe, figurèrent diverses « amitiés imaginaires ». L’opérateur de René Clair Michel Keller se souvenait de plusieurs figures récurrentes :
« un personnage de virtuose […], "le Monsieur qui voulait faire croire qu’il avait beaucoup voyagé", "le Timide qui voudrait raconter ce qu’il a vu, mais qui n’arrive pas à placer un mot", suivi de "l’Homme qui n’est pas d’accord et qui peut le prouver car il a un papier dans une de ses poches". »
Quant à son « Archevêque », Gérard Philipe se livra un jour à un virtuose et apparemment hilarant « sermon sur l’œuf » dans la cantine des studios, ce qui lui valut une ovation générale. Son « "Ouin-Ouin", personnage idiot se croyant idiot ou un malin se faisant passer pour idiot » avait aussi beaucoup de succès. Le comédien « […] aimait son petit monde fictif et farfelu, plein de trouvailles, de traits d’esprit, de drôlerie, source inconsciente d’entraînement et d’étude certainement nécessaire à son merveilleux talent », conclut Keller. (Gérard Philipe, Souvenirs et témoignages, op. cit., p. 114.)
Cette aptitude à amener des univers fictifs jusqu’à son auditoire revient comme un leitmotiv dans les souvenirs des partenaires ou proches de Gérard Philipe. C’est déjà un brouillon de l’une de ses techniques de comédien (à ce propos, voir les propos de Michel Bouquet). Si ces souvenirs sont davantage attachés à la jeunesse de Gérard Philipe, les aperçus plus tardifs de ce don sont également présents : certains de ses discours officiels à double sens sont restés dans les mémoires. Ayant gagné en maturité, le comédien se servira toujours de ces talents d’improvisateur et de diseur, mais le masque social restera davantage en place. De ces improvisations exubérantes ne subsiste sans doute que le long récit de sa rencontre avec une « sirène », donné en 1946 à un magazine de cinéma qui insistait pour connaître l’histoire de son premier amour.
Il aurait donc été doté de dons protéiformes ! Conteur, improvisateur, mime (même s’il a sans doute approfondi cette facette de son art par la suite), ventriloque (il en fera une démonstration étonnante dans une émission canadienne, à retrouver ICI en vidéo) imitateur, dont le cinéma garde peu la trace. Certains aspects de sa personnalité de comédien n’ont donc pas été fixés par la pellicule. Ou si peu.
Après sa famille (elle-même dotée d’une imagination romanesque, sa mère Minou Philip a apparemment nourri cette capacité d’évasion chez son cadet), ce sont les apprentis comédiens de Cannes qui furent ses premiers spectateurs. En 1942, « il était déjà bourré de talent, et faisait crouler de rire son auditoire, notamment à la fin des repas, en disant des poèmes de Franc-Nohain », se souvenait Danielle Delorme qui avait entraîné Gérard Philipe dans le cours de comédie de Jean Wall à Cannes. (Citée par Gérard Bonal, Gérard Philipe, Seuil, 2009, édition augmentée, p. 37.)
Le jeune comédien parvint même à captiver jusqu’aux professionnels qui accompagnaient ses premiers pas professionnels en scène dans Une grande fille toute simple. Le dramaturge André Roussin se rappelait que :
« Après la [première] représentation, Gérard nous a emmené chez lui. […] Et c’est Gérard, le "petit débutant", qui est devenu la vedette de la soirée. Il nous a récité des Fables de La Fontaine en "algérien", puis fait des imitations et enfin des exercices d’élèves comme on les appelle, par exemple "j’arrive chez le coiffeur, je suis pressé et il y a beaucoup de monde".
Toute notre soirée se passa à regarder ce débutant. Tous nous pensions : "Ce gosse a devant lui une carrière éblouissante."
C’est ce soir-là que j’ai découvert quel extraordinaire clavier possédait Gérard. J’avais vu jouer un jeune premier pur et passionné, je découvrais une autre facette, pleine de fantaisie, d’humour, de gaieté. » (Gérard Philipe, Souvenirs et témoignages…, op. cit., pp. 26-27.)
Gérard Philipe, un improvisateur très doué
Cette verve ne s’est pas tarie pas lorsqu’il « est monté » à Paris avec sa famille. Au Petit Paradis, l’hôtel désormais géré par son père, Gérard Philipe avait une chambre sous les toits et y réunissait ses amis comédiens. Il éblouissait également son auditoire dans les soirées où il se rendait : Tony Jacquot, qui l’a connu aux soirées de Lise Delamare, se souvenait qu’« Il avait une sorte de génie ; on lui soufflait un thème et il improvisait. » (Gérard Bonal, op. cit., p. 54.)
Ce talent de conteur est longuement évoqué par Paul Giannoli dans une biographie romancée, davantage prétexte à empiler des anecdotes sur Gérard Philipe qu’ouvrage sérieusement documenté. En dépit de l’aspect hagiographique de l’anecdote, on peut sans doute y retrouver un souvenir (embelli par la mémoire ?) de ces récits rocambolesques.
« On s’[assoit] gravement par terre [dans la chambre de Gérard Philipe à l’Hôtel du Paradis]. C’est là que les amis de Cannes sont revenus se coller à Minou et Gérard comme des phalènes autour des lampes d’été. […]
À son tour, de toute son âme, chacun dit un poème. Mallarmé, Rimbaud, Apollinaire.
Gélin est sombre, affamé, tourmenté. Signoret est toutes flammes. Gérard est là, silencieux longtemps. Puis quand ils sont las de mots trop magiques, de rimes obsédantes, d’alexandrins qui font mal à mâcher, l’un dit : "Raconte... "
Gérard, alors, jaillit de sa torpeur attentive. Il y a entre lui et eux un personnage secret : "Lui", héros de toutes les aventures qu’invente Gérard.
Tour à tour corsaire, archange, petit bourgeois misérable, conquérant de feu. Il peut tout lui arriver.
"Un soir qu'il avait marché trop longtemps au bord des routes espagnoles..." Et le conteur est devenu brigand comme lui. Ses cheveux lui barrent le front d’une balafre sombre. Les dents pointues luisent dans l’ombre. Sourire cruel. Duels imaginaires. Les filles fuient le loup. Cette fois "il" a eu une dure histoire. La prochaine fois, il sera poète triste et amoureux. » (Paul Giannoli, La vie inspirée de Gérard Philipe, Plon, décembre 1960, pp. 15-16.)
Si cette scène très romancée s’inspire réellement de souvenirs, comment ne pas être étonnés de sa similitude avec le personnage d’Alfred Savoir, ce Figurant de la Gaîté miséreux qui, pour séduire une femme inaccessible, s’invente plusieurs vies en se revêtant de costumes de théâtre : cardinal, maharajah, dompteur, etc ? Ce rôle, qui parut si anecdotique aux chroniqueurs dramatiques, Gérard Philipe l’a peut-être choisi en écho à ses récits exubérants… Clin d’œil personnel ? (À moins que ces souvenirs ne soient contaminés par la pièce…) Quoi qu’il en soit, à plusieurs reprises, l’acteur a manifesté sa « crainte d’être enfermé dans un personnage définitif », comme le soulignait son ami René Clair (Gérard Philipe, Souvenirs et témoignages…, op. cit., p. 208).
Évidemment, l’un de ses auditoires préférés restait celui des enfants. Sans doute parce que les biographes insisteront beaucoup par la suite sur sa « pureté » et son « esprit d’enfance », ces notions si importantes dans la construction du mythe public, tout ce qui touchait à cette facette de son talent a été mentionné : Henri Alekan qui noua des liens avec lui sur le tournage des Petites du quai aux fleurs reviendra sur « l’accent suisse et les histoires de "Ouin-Ouin" » racontées alors à sa fille de cinq ans.
Vercors, invité avec son épouse dans la villégiature des Philipe à Ramatuelle, se souviendra avec émerveillement de l’écho des récits du soir fait par Gérard Philipe à ses deux enfants durant l’été 1959 :
« […] Nous entendions à travers les murs Gérard déclamer, élever peu à peu le ton, pousser un hurlement sauvage, soudain parler tout bas, avec des tremblements dans la gorge, se taire dans un long "suspense", reprendre brusquement avec verve, avec flamme, avec ironie, avec onction, avec un comique joyeux, avec toutes les ressources de ce timbre inimitable, de ce talent inimitable… Le tout ponctué des rires, des cris de surprise ou d’effroi de ses jeunes auditeurs. L’histoire ? Celle, inventée chaque soir, de Zoé-la-petite-fille-qui-avait-de-l’initiative. […] » (Gérard Philipe, Souvenirs et témoignages…, op. cit., p. 368).
De redoutables canulars téléphoniques
Mais ces récits imaginaires peuvent également empiéter sur la réalité, comme ces canulars téléphoniques si appréciés par Gérard Philipe. On peut dater précisément l’un d’entre eux, « l’opération Docteur Petiot » comme l’appelle Giannoli : le 11 mars 1944,
« […] Le cadran du téléphone crépite doucement […]. Dans l’ombre le regard de Gérard s’étire, diabolique. Le déclic claque, sec. Une voix de femme jaillit. […]
Rauque et autoritaire la voix de Gérard déguisée, attaque.
"Allô, madame Mélinand ? Ici la police, la table d’écoute de la police. Nous surveillons depuis plusieurs heures le Dr Petiot en fuite et nos informateurs nous signalent qu’il aurait franchi la porte de l’immeuble et selon toute vraisemblance devrait essayer de se réfugier chez vous. N’ayez surtout pas peur, madame."
"Mais monsieur le Commissaire... c’est horrible... que dois-je faire ?
— Pas de panique surtout poursuit gravement Gérard. N’ayez aucune crainte, la police est là pour vous protéger. Laissez toutes les issues ouvertes, les portes, les fenêtres, cachez-vous dans un placard, toutes lumières éteintes et laissez-nous le soin de l’attraper.["]
Le téléphone a claqué de nouveau. Une explosion de rires secoue la bande. Simone Signoret, la "pousse au crime" du lot, suggère à présent que Gérard rappelle en prenant la voix du supposé Dr Petiot. Toute la soirée la mère de Monique Mélinand attendit dans l’ombre et trembla de terreur.
Dans le hall de l’Hôtel du Paradis on n’avait pas de remords. » (Paul Giannoli, La vie inspirée de Gérard Philipe, Plon, décembre 1960, pp. 17-18.)
« […] Drapée dans une antique robe de chambre en flanelle affaissée, Marcelle est prête pour son rendez-vous quotidien.
Gérard, accroupi, détaille avec plaisir le numéro de téléphone : T... R... O... 1… 2… 4… 4…
— Allô ! (Marcelle fait voix douce.)
— Allô ! c’est vous ? répond une voix masculine.
L’écouteur collé prés de sa tempe, Gérard se délecte de chaque réplique. Personne n’a jamais eu l’idée de chercher à savoir qui était TRO 12-44.
Ils l’ont appelé un soir, au hasard, pour rire. Et depuis, tous les soirs ils offrent au mystérieux correspondant sa part de rêve. Il n’est question que de laquais, de week-ends mondains, de femme du monde désœuvrée, voluptueusement étendue sur du brocart, pelotonnée dans des plumes de cygne.
Gérard trépigne de joie et pimente la conversation de conseils délirants :
— Comme le disait le proverbe russe : "Mange ta patate pendant qu’elle est chaude, c'est le plat de la vérité." Pour les instants de silence il a une réplique magique et passe-partout : "La chasse aux tigres, enchaîne-t-il d’un ton docte, a pris cette année-ci une extension considérable dans les pays chauds." » (Paul Giannoli, op. cit., p. 28-29.)
On dirait presque un aphorisme tiré des chroniques d’Alexandre Vialatte !
« D’autres fois », relate Gérard Bonal qui a recueilli les souvenirs de Marcelle Arnold,
« Gérard prend lui-même l’appareil. Non sans une certaine cruauté. Témoin ce dialogue:
"Allô ! dit Gérard en contrefaisant sa voix. C’est Monsieur. Nous rentrerons tard, Madame et moi.
— Monsieur me l’a déjà dit, répond la petite bonne.
— Nous ne serons pas seuls. Nous amenons des amis à dîner.
— C’est qu’il n’y a rien, Monsieur !
— Ouvrez les boîtes de sardines, les paquets de pates. Tout !"
Fin de la communication. Le lendemain, Gérard rappelle. Un homme décroche. Et Gérard : "Alors, le dîner était bon ?" » (Gérard Bonal, op. cit., p. 78.)
Cruauté ? Exutoire, probable jeu d’adolescent (tardif) qui se moque des conséquences (pourtant non négligeables en ces temps de rationnement). En 1944, son ami Jacques Sigurd lui reprochait son côté « superficiel, égoïste et profondément sec », son « égoïsme et sa sécheresse », lui demandant de « se méfier comme de la peste » de son « côté brillant » même s’« il est utile. Il faut le garder » (Correspondance citée par Gérard Bonal, op. cit., p 64). Mais Sigurd parlait en ami, le reproche de manquer de « cœur » peut être d’autant plus cinglant s’il est glissé avec diplomatie dans une de ces notes que Jean Vilar adressait à sa troupe… Le goût égoïste de l’effet peut parfois masquer les conséquences sur les malheureux participants au canular.
De ces jeux d’un goût parfois douteux réalisés avec Sigurd Gérard Philipe disait en 1952 : « Nous habitions ensemble, cherchant des rôles... Enfin... On téléphonait, par exemple, tous les soirs chez Delannoy qui venait de faire "La Part de l’ombre", pour le plaisir de l’entendre demander, "C’est de la part de qui ?" et de lui répondre, "De la part de l’ombre !" » (Cité par Bernard Chardère, « Jacques Sigurd : Scénariste existentialiste » dans Jeune Cinéma (automne 2011), p. 55.)
Le metteur en scène Georges Vitaly (qui le dirigera dans Les Épiphanies) était d’avis qu’« il rayonnait d’une sympathie à travers laquelle on devinait un besoin de conquérir les êtres, de provoquer et de dominer les événements. » (Gérard Philipe, Souvenirs et témoignages…, op. cit., p. 56). Or, pour un comédien, emporter son public dans une autre réalité, n’est-ce pas aussi le dominer un peu, lui faire croire l’espace d’un instant ce qui n’est pas ? Cette force de persuasion et d’invention fait donc partie des outils de son art... Cette période de canulars est aussi celle où « avec Jacques Sigurd et Marcelle Arnold [,] nous nous jouions des sketches comme si on avait dix ans de plus, en blague et… avec optimisme », dira Gérard Philipe (Gérard Philipe, Souvenirs et témoignages…, op. cit., p. 66 ; non sourcé). Variations sur des thèmes, encore et toujours. Apprentissage ludique d’un métier, finalement assez peu différente des saynètes jouées au téléphone.
Il mondo alla rovescia…
Enfin, cet humour semble d’ailleurs se délecter des situations de bascule ou de renversement : vision carnavalesque des choses ou simple opportunité attrapée au vol ? De quoi subodorer un goût penchant aussi vers des emplois où on ne l’attend pas ?
On en trouve deux exemples racontés par Giannoli, probablement contés par ceux qui en furent les témoins.
À Cannes, alors qu’il tourne Les petites du quai aux fleurs, ce sont les comédiennes Danielle Delorme et Colette Richard qui sont alors victimes de sa rage du déménagement qui fait suite à un récit interminable.
« Les blagues sont les chefs-d’œuvre de Gérard.
[…] "Nous avions une chambre au Négresco, Danielle et mol, se souvient Colette Richard. Une vraie, avec deux lits. Un jour Gérard était venu. Le couvre-feu a sonné avant la fin de son histoire. Il a couché sur la descente de lit. Au petit matin, la production est venue nous chercher. Lui ne tournait pas. II n’a même pas dit bonjour. Il a bondi dans mon lit en grognant et il a continué à dormir. "
"Les lits, c’est fait pour être changé de place, soutient Gérard à Jacques Dynam. Les plantes vertes aussi, sinon elles s’ennuient et le hall est très triste." Et ils font l’échange : trois cents pots environ sur dix mètres carrés, meubles compris.
Elles ont mis trois heures pour redescendre les plantes vertes dans le hall du Négresco. » (Paul Giannoli, La vie inspirée de Gérard Philipe, Plon, décembre 1960, p. 11.)
Il est vrai qu’Henri Alekan qui noua des liens avec lui sur ce tournage disait : « C’était un grand enfant débordant de vie et qui faisait aussitôt la conquête de tous. » (Gérard Philipe, Souvenirs et témoignages…, op. cit., p. 32.) Cet « esprit d’enfance » se manifeste également en 1944 ( ?), lorsqu’élève au Conservatoire, il joue un tour qui se révélera des plus funestes pour l’une de ses condisciples…
« […] Gérard Philipe [dirige] les grandes manœuvres du commando des "farceurs" : Michel Auclair, Jean-Pierre Granval, Michel Bouquet, Sophie Desmarets, Hélène Constant, Jacques Sigurd, Maria Casarès.
Leur plus belle victoire, ils l’ont gagnée à la force des poignets et sur un champ de bataille de choix : un trois pièces-cuisine dont ils sont venus à bout entre minuit et deux heures du matin.
"Une belle nuit, soupire Jean-Pierre Grandval. Une de ces soirées comme nous les aimions, mal commencées, bien terminées. Une ingénue du cours nous avait conviés à une surprise-partie chez elle. Mortel ennui ! La famille en contre-champ. De la distinction jusque dans la limonade et des tapis à respecter."
Jusqu’à minuit ils sont héroïques. Les parents leur ont souhaité une joyeuse fin de soirée et sont partis se reposer dans la pièce à côté. Gérard, charmeur, s’est incliné profondément sur la main de la dame. Elle lui aurait confié les clefs de sa demeure et le cœur de sa fille s’il l’avait souhaité. Mais dès qu’elle a tourné le dos, il dirige les opérations. La salle de bains permute avec la cuisine et le salon avec la salle à manger. Tous les meubles, tous les tableaux et même l’armoire à pharmacie changent de place sous l’œil désapprobateur mais sournoisement ravi de la jeune fille de la maison.
Le lendemain, sa carrière d’ingénue s’acheva devant le conseil de famille. » (Paul Giannoli, op. cit., p. 25.)
Si le théâtre français perdit une ingénue, un jeune premier y gagna ses galons de déménageur.
Illustrations : portraits de Gérard Philipe par Francis Pacaud (source : Mutual Art), et Lucienne Chevert (source : Mutual Art) – carte postale allemande, siglée T.N.P. au verso.
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